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Extrait de "Sa Majesté Pirate"

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Le Dragon des Mers


​Juin 1347.

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Une sueur froide emperlait le front dégarni de Laurent de Lengres. Les mains liées derrière le dos, au pied de la planche qu'il allait parcourir lentement avant de sauter dans les vagues sombres de la Méditerranée, il se maudissait de ne pas avoir écouté sa fille Cassandra. Elle l'avait conjuré de ne pas naviguer, car, avait-elle annoncé, il se ferait arraisonner par des pirates. Il savait pourtant qu'elle disait souvent des choses qui se révélaient exactes. Mais il avait déjà repoussé son voyage de plusieurs mois. Comme elle persistait dans ses funestes prédictions, il avait armé son bateau préféré, l'Irène, de catapultes, engagé une dizaine de mercenaires, équipé ses marins de sabres et de poignards ; il avait fait même dire plusieurs messes à Notre-Dame des Accoules. Le sort ainsi conjuré, il était parti. Peine perdue. De retour vers Marseille, l'armateur avait croisé la route d'un bateau effilé entièrement noir qui avait hissé le terrible pavillon. Le pirate n'avait fait qu'une bouchée des soldats, marins, sabres et catapultes, avant de transférer sur son navire le contenu des cales dodues de l'Irène, en se léchant calmement les babines.Un tambour résonna lentement. Les bandits des mers sourirent de contentement. C'était leur moment préféré, leur récompense. Un marin chauve saisit le bras de Laurent avec un rictus. Le Marseillais jeta un coup d’œil sur le château d'arrière, où le capitaine du bateau pirate l'observait sans rien dire. C'était un homme jeune, de type grec, aux cheveux d'un noir brillant qu'il portait attachés sur la nuque par un lien de cuir, remarquable par le bleu vif et transparent de ses yeux qui lui donnait un air redoutable. Mais sans doute l'était-il pour de bon.

Tout son visage était en arêtes tranchantes. Il se dégageait de lui une puissance et une détermination telles qu'il s'était taillé une réputation impitoyable. Bien sûr, il était loin d'être un ange. Cependant, il se conformait tout simplement aux normes de la piraterie de l'époque. Si la proie ne se rendait pas, il combattait. Pour l'exemple, il tuait le capitaine mais les hommes d'équipage étaient chargés de conduire le bateau arraisonné à un port, où il le revendait à des armateurs peu regardants. Les marins étaient ensuite libérés, sauf les non-chrétiens qui finissaient comme esclaves. Il n'y a pas de petit profit, et celui-là était plutôt lucratif.

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En fait, son navire avait une allure aussi formidable et sinistre que lui : c'était un dromon1 noir renforcé de plaques de fer, rehaussé à l'arrière par un gaillard. Sa figure de proue représentait une tête de dragon, aux mâchoires articulées ouvertes sur de terribles dents d'acier. Les yeux taillés dans des grenats énormes lançaient des clartés rouges. À l'approche d'une proie, l'horrible gueule crachait du feu : en fait, un marin actionnait la manivelle d'une espèce de tube relié à un réservoir plein de feu grégeois. Le Dragon des Mers frappait les esprits et semait la terreur en Méditerranée.

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Andronic Lascaris, le capitaine, observa l'armateur ligoté, un homme dans la force de l'âge, aux cheveux longs d'un brun chaud, presque roux. Cet homme avait voulu le combattre au lieu de se rendre. Courageux, mais stupide. Qu'il en paie les conséquences. Il fit un signe de la main. Son marin entraîna le prisonnier vers la planche fatale. Laurent se débattit, mais un autre homme vint prêter main-forte. Ensemble, ils le hissèrent. Debout, le malheureux respira l'air du large. Dans un instant, ses poumons se rempliraient de cette eau noire qui mouvait à ses pieds. Dieu ! Pourquoi n'avait-il pas écouté Cassandra ! Il regarda autour de lui à la recherche d'une inspiration. Le dromon oscillait dans le roulis, voiles repliées. Sous lui, des masses d'eau sombres se soulevaient puis s'affaissaient en un mouvement perpétuel. Il allait sauter là-dedans. Il allait s'y engloutir. Il allait mourir. Soudain, il y pensa :

- Vous voulez conquérir Byzance ! cria-t-il au capitaine.

Stupéfait, Lascaris leva la main pour arrêter l'exécution.

 - Qu'est-ce que tu dis ? !

 - Ma fille… Elle m'a prédit ce qui m'arrive, cria Laurent d'une voix précipitée. Je ne l'ai pas écoutée. Alors, quand je suis parti, elle m'a dit de dire, au moment où j'allais mourir, « vous voulez conquérir Byzance ». Que ça allait me sauver.

Le pirate fixait son prisonnier d'un regard soutenu. Comment diable… ?

 - Ramenez-le ! ordonna-t-il.

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De cet auteur, j’avais beaucoup (vraiment beaucoup !) aimé la trilogie historique qui débutait par Emma, un bien étrange écuyer. Ce n’est pas pour autant que j’avais un a priori favorable en commençant Sa Majesté Pirate : certains écrivains sont bons au début mais ne savent pas toujours se renouveler…
J’ai été littéralement scotchée.

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